L'écriture journalistique - Les moments forts de cette journée — Les Mardis de Saint-Jean

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Les Mardis de Saint-Jean

L'écriture journalistique - Les moments forts de cette journée

Frédéric Mounier nous a proposé d'échanger sur les 3 temps de l'écriture : avant, pendant et après. Retour sur le Mardi du 13 mai 2014 à Grenoble.

1. Les questions que vous vous posez vous sont aussi les questions que la presse française se pose.

La journée a été dense et nous ne pouvons tout retranscrire. Cependant nous avons pris des notes des paroles de Fréderic Mounier que nous vous retranscrivons simplement.

 

2. "N'ayez pas peur !"  (Avant d'écrire)

Ne vous laissez pas impressionner, tétaniser par la notion d'objectivité. Je crois que ça n'existe pas. En revanche, je crois très fort à l'honnêteté par rapport à nos lecteurs. Cela suppose que vous connaissiez votre public. La difficulté dans le principe de diffusion « toutes boîtes » : cela signifie que vous parlez à tout le monde. Cela veut dire aussi que vous vous donnez les moyens de ressentir les personnes pour qui vous écrivez. Vous avez des publics plus ou moins jeunes, plus ou moins cultivés, plus ou moins intellectuels.... Lorsque vous vous préparez à écrire, je voudrais que vous ayez en tête une personne que vous connaissez : vous écrivez pour cette personne-là. Nous professons la religion de l'incarnation, essayez d'incarner votre regard. Essayez de travailler les moyens de faire connaissance avec votre public et de le porter dans votre coeur. 

3. "C'est en butinant ensemble qu'on fait du miel. " (avant d'écrire)

 

Avant l’écriture, je pense que des conférences de rédaction, c'est important : c'est en butinant ensemble qu'on fait du miel. Confronter les points de vue, ça me paraît essentiel.

Avant d'écrire, lisez les journaux autour de vous, écoutez les radios locales, sillonnez les sites Internet de votre zone de chalandise. Cela vous permettra de comprendre les questions, les préoccupations, les sujets qui montent, ceux qui fâchent... les sujets qui sont bons pour vous.

4. "Racontez une histoire !"  (pendant l'écriture)

Imaginez le scénario de votre article. Le monde est tellement riche qu'il nous offre une matière incroyable. Racontez une histoire à la personne que vous avez dans le coeur. Prenez-la par la main. Il n'est pas censé savoir de quoi vous parlez... Dans un article que j’ai parcouru sur un appel au secours pour les finances paroissiales, je n'ai pas lu un mot sur les montants (recettes/dépenses), et sur ce qu'on finance ou pas avec ce budget : soyez pédagogue... Soyez rigoureux.

 

5. Les 5 questions de base  (pendant l'écriture)

Il faut répondre aux cinq questions de base : qui, quand, où, pourquoi, comment ?

Qui ? Elle s'appelle Georgette, mais Georgette comment ? Et elle fait quoi dans la vie ? 

Quand ? Où ? Les lieux ne sont pas connus de tout le monde, précisez la paroisse, la commune...

Pourquoi ? Comment ? Indispensable pour raconter votre histoire ! 

6. Espérance, Humilité et travail (pendant l'écriture)

Ne soyez pas amoureux de votre propre écriture ! N'écrivez pas pour vous ! Vous écrivez pour votre public. Lorsqu'on écrit pour soi, on peut se laisser aller à la facilité, à des types de langage, des longueurs... Vous avez des délais et des espaces précis, donc, oubliez-vous et n'oubliez pas votre public (1 feuillet = 1000 signes = 1 idée).

N'hésitez pas à vous faire relire. Laissez-vous remettre en cause. A La Croix, chacun de nos articles passe par six ou sept niveaux de relecture. Plus c'est court, plus c'est lu, et plus c'est difficile à écrire. Les brèves, c'est insupportable, mais dans un journal, le lecteur lit les brèves avant de lire les grandes masses.

N'hésitez pas aussi à réécrire, sans cesse remettre sur le chantier.

Soyez pressé par le temps : je travaille mieux quand je n’ai pas le temps, sinon nous sommes tous des procrastinateurs. Laissez-vous modeler par cette contrainte : une chose viendra du fond de vous-mêmes pour vous aider à écrire.

La France est un pays dépressif aujourd'hui. En Italie, rien ne marche mais tout le monde est gentil. Vos médias sont là pour redonner de l'espérance aux gens, leur donner envie de vivre. Même si tout va mal, il y a toujours quelque chose qui va un peu mieux. Dans la presse catholique, on fait plus attention à l'herbe qui pousse qu'aux arbres qui brûlent. Si vous écoutez France Info en continu, au bout de deux jours, vous n'avez plus qu'une chose à faire, c'est vous flinguer.

Ne pas regarder dans le rétroviseur, regarder devant et donner envie de reconstruire la famille, la paroisse, l'Église...

7. Soignez votre vocabulaire et pensez bi-media (pendant et après l'écriture)

Pendant l'écriture, éviter « la langue de buis » que l'on pratique dans l'Église. Si vous diffusez en toutes boîtes, employez des mots que tout le monde comprend : votre identité n'est pas dans les mots, elle est dans l'espérance.

Après l'écriture, ce n'est pas fini... il faut continuer d’informer : entretenir un site Internet est une activité très chronophage. S'il n'est pas actualisé en permanence, il ne sert à rien. Il doit être interactif. Quand vous écrivez pour le Web, vous constituez une base de données avec des archives référencées.

 

8. Relecture et autres discussions

La presse paroissiale vue par Frédéric Mounier

Dans la presse paroissiale, j'ai perçu une forme de timidité. Papiers anonymes, pas de légendes photos, textes écrits par la personne invitée... impression d'inachevé. On aimerait bien aller plus loin, en savoir plus. J'ai envie de vous encourager ! Et puis, il y a des sujets que je n'ai pas trouvés : la Manif pour tous, les funérailles célébrées par des laïcs... A Rome, il va y avoir deux sessions du synode de la famille : quid de la question des divorcés-remariés ? Parlons-en ! Assisterons-nous à une réforme souhaitée par le pape ou pas ?

Il faut aussi, dans vos colonnes, décliner une actualité nationale à partir d'une accroche locale sans courir le risque de faire peur en donnant la parole à tous.

Etre catholique c'est être exposé.

Les médias catholiques de proximité sont au coeur de l'actu... rapport avec le prêtre : dispose-t-il d'une autorité, comment sont recrutés les laïcs autour de lui... ce sont des questions ouvertes dans l'Église. Vous êtes la voix de l'Église catholique locale. Certains lecteurs sont en demande de catéchèse.

Le pape François utilise un vocabulaire simple qui est repris par les journalistes.

La presse paroissiale est-elle au service de l'Institution ou de la Parole ? Pourquoi choisir l'un ou l'autre ? C'est une question qu'on se pose tous les jours à La Croix. Sur les débats qui entourent la fin de vie, une partie de la société souhaite que le suicide assisté devienne un droit humain. Le chrétien, quant à lui, croit que toute vie mérite d'être vécue. Notre travail c'est de clarifier le débat, de faire apparaître ce qui est en jeu, de dire ce que l'Église pense en l'explicitant. Notre travail est un travail de médiation : créer un pont, établir un dialogue. Eviter les débats, ce n’est pas une bonne façon de rendre le service de l'espérance à notre société. Les catholiques ont des choses à dire, sans pour autant dire du mal de ceux qui pensent autrement.

On est un pays marqué par une laïcité de combat. De fait, l'Église traîne une réputation qui la condamne à être vieille, conservatrice et riche, mais c'est faux ! Aujourd'hui, cette image est modifiée par ce nouveau pape incroyable qui est célébré par tout le monde. Nous sommes confrontés, dans notre métier, à un fonds d'images et d'opinions publiques auxquels on ne peut pas échapper, une conséquence probable de l’effondrement de la culture religieuse depuis ces 5 à 10 dernières années.

Quand vous écrivez, il faut faire des choix parmi les éléments fournis par vos interlocuteurs. Tout n'est pas important : il faut faire court. Nous ne sommes pas lus comme nous écrivons. Nous sommes lus par petits bouts ? L'encadré sera probablement lu avant l'article et encore, si l'article est lu !

Les images sont regardées avant toute lecture : d’où l’importance du choix des illustrations. La photo est à mettre en perspective avec d'autres questions : comment la page sera construite, quelles sont les autres photos, tout le monde ne renâcle pas à l’idée de figurer dans le journal. La question du visuel n'est pas accessoire. Le papier est lu bien après la perception de l'image et tout ce qu'il y a autour, notamment la légende.

9. Conclusion

Le taux de lecture va s'effondrer, il faudra penser sans le papier : le bi-média, oui, mais de quelle façon ? Quel équilibre budgétaire ? Quels sont nos supports de demain étant donné les difficultés financières des paroisses et des diocèses.

La clé, effectivement, c'est le service rendu : quel service rendons-nous avec nos journaux ?

Il y a comme un impératif à soigner la valeur d'usage du journal chrétien. M. Toute-Boite attend aussi des réponses toutes simples aux questions qu'il se pose sur le baptême, le mariage...

 

 

  • Les journées se déroulent de 10h à 16h
  • Elles comprennent une réflexion apportée par un ou plusieurs intervenants et des ateliers d'échanges et de pratique.
  • Les formations sont gratuites et prioritairement réservées aux adhérents de l'AEPP.
  • L'inscription est obligatoire, en ligne ou en nous contactant aux coordonnées ci-contre.
  • Les personnes inscrites reçoivent les informations pratiques dans les jours qui précèdent l'évènement.